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vendredi 14 mai 2010

Hommage à Pierrot en Fa mineur.


Mon très cher Pierre,
J'ai conscience du saugrenu de la situation mais tu avoueras que toi-même, tu as déjà usé de ce stratagème pour expier un sentiment contraignant ou pour t'adresser à un fantasme.
Je t'écris cependant cette lettre que je ne publierai peu-être jamais (ben voyons !! comme si j'allais me priver de montrer mon cœur gratis alors que tu te faisais rétribuer pour dévoiler ton cul).
Je disais donc que je t'écrivais cette lettre que tu adoreras détester, depuis ton tombeau au Père Lachaise, où tu dois te reposer dans une paix somme toute relative vu la haine que tu vouais à la mort, et l'emplacement de ta sépulture, en face de celle de Chopin excusez-moi du peu, un autre génie non pas des lettres mais des notes, également emporté par la maladie relativement jeune.
Si je me décide enfin à t'écrire ces quelques mots posés sur un Moleskine aux feuilles beiges à l'aide d'un crayon de papier, enrobé de valse triste et de Picon Bière, dont la délicieuse amertume n'a rien à envier aux larmes que je pourrais verser, ce n'est pas pour te louer, ou prendre ton fantôme à témoin des malheurs du monde en général et des miens en particulier. Non, si je m'adresse directement à toi, en me permettant au passage de te tutoyer, alors que tu ne soupçonnes pas mon existence et que je sais tout ou presque de ton œuvre, c'est pour te dire que je te quitte.
Non n'insiste pas ma décision est prise. Je ne peux plus continuer comme ça à tenter de faire ressembler ma vomissure indigeste à tes envolées lyriques, mes rots convulsifs de jeune attardé du vingt et unième siècle à ta voix rauque et sombre de l'époque où tu sévissais dans le poste, et mes pauvres flatulences de pétomane introverti à tes calembours magistraux... J'en ai fini !
Pourtant je t'ai aimé. Depuis les premier bourgeons de mon adolescence trouble où j'étais persuadé de faire partie d'une élite et d'avoir l'air intelligent parce que je comprenais l'essentiel de tes tirades et que j'appréciais cette façon de dire couille bite ou merde sans
jamais avoir l'air vulgaire.
Oui je t'ai aimé, et ce jusqu'aux prémices de mes balbutiements chroniquaux, bonjour le pléonasme, qui m'ont amenés à te pomper allègrement et de manière maladroite pour faire rire mes copains et faire réagir les cons.
N'y vois pas un vampirisme éhonté de ton talent que je jalouse mais un hommage à l'homme des belles lettres que tu fus. Et le problème avec les fûts c'est que les feux y restent souvent coincés tant le trou de ces derniers sont étroits.
Je ne vais pas non plus me confondre en excuses pour m'être inspiré de ta verve acide étant donné que le propre d'une lettre de rupture est de reprocher au destinataire ce que l'expéditeur n'a jamais pu assumer.
Si je ne te lis plus ni ne t'écoute à l'issue de ce petit texte, ta voix résonnera encore dans chacune de mes chroniques tant leur fondation repose sur toi Pierre Desproges.
Avec toute l'humilité et la sympathie d'un écrivaillon vivant dans ton ombre, adieu.

1 commentaire:

Blackagar Boltagon a dit…

... Même mon vilain esprit de contradiction ne trouve rien à y redire...
Repose en paix Pierre! C'était le plus grand.

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